ARCHIVES

Pommes de taire à jamais

Pommes de taire à jamaisCela fait plusieurs années que je travaille sur le thème de la fragilité, m’interrogeant sur ce qui rend vulnérable la condition humaine. Je confronte les énigmes existentielles à notre monde contemporain occidental, où la mort est donnée en spectacle par les médias, ou inversement, complètement occultée, comme si le trépas, le vieillissement étaient obscènes…

Bien sûr, je ne cherche pas une réponse aux questions que l’Homme se pose depuis toujours, mais vous propose une rêverie sur le « vivre » et le « mourir » comme un songe nécessaire. Par le biais de figurations fragiles, poétiques et métaphoriques, je crée un espace de retrouvailles entre le jour et l’ombre.

Face à un monde hyper technologique, industrialisé, je réplique par la simplicité. J’ai fait le choix de sculpter une matière instable, périssable : la pomme de terre, dont le vieillissement, suivi d’une spectaculaire germination, vient nourrir ma réflexion sur la fragilité. J’ai distingué ce légume entre tous car il est populaire et constitue la base alimentaire de beaucoup d’entre nous, mais encore parce que les rondeurs de la pomme de terre, ses irrégularités, ses bourgeons, ses cicatrices, témoignent de son évolution, permettent d’évoquer un écho à la vie.

Dans un premier temps je les sculpte en atelier, puis observe la métamorphose que le temps trace progressivement dans leur chair…

J’accompagne ces changements et finalement intègre ces petites têtes réduites à l’extrême à mes sculptures, poupées réanimées au son d’anciennes mélodies.

Je les fais ÊTRE en réponse au néant, à travers différents vecteurs d’expression : la sculpture, la photo, la scénographie, le diaporama, le son, la gravure, l’installation…

Chaque fétiche est le fruit d’utopie, d’humour, d’amour ou de violence. Ainsi ma tribu, nous propose d’accueillir nos peurs ; ces hybrides, LES FRAGILES ramènent chacun à sa propre histoire…

Il ne s’agit pas là de faire preuve de convoitise morbide, mais humblement, de recueillir nos paroles, nos sentiments autour de l’inéluctable.

Pommes de taire à jamais

 

Vivre la forêt capillaire

Vivre la forêt capillaireCette forêt est un lieu qui ne mène nulle part, un lieu de départs et d’arrivées, un lieu où le promeneur doit progresser tactilement. C’est un espace d’étrangeté provoquant toutes sortes de questions fondamentales.

Ici, la forme symbolique de la forêt, je l’évoque par la verticalité des « fils de sève » transparents ; idée première et simple de vitalité mais qui sous le poids de sa fine coulée distribue un feuillage capillaire mouvementé et sonore.

Animées, les petites mèches de cheveux sont vues comme autant de présences ondoyantes, de flux continus pour imiter le vent, les feuilles… Chacune d’elle est une identité organique ayant la mémoire de son devenir, de sa naissance ou croissance future ainsi que l’inconnu de son départ.

Le public peut pénétrer dans ce lieu où les cheveux sont tout ce qui reste du visage original et s’enfoncer dans une mousse capillaire profonde en cris de velours. Marcher dans cet espace c’est aussi prendre le risque de s’y perdre, mais « incarner les questions existentielles est bien mieux que croire y répondre »

Vivre la forêt capillaire

 

La Marelle

La MarelleL’installation LA MARELLE est une mise en scène de la fonction protectrice du JEU comme signe de lutte contre les blessures d’enfance.

Elle représente le continent oublié de l’enfance et révèle les divisions intérieures des âmes meurtries dont les cicatrices sont évoquées à travers la chair fragile des tubercules.

Une cohabitation du CIEL et de l’ENFER comme mécanisme de défense où une victoire est toujours possible et où le rire peut devenir une arme de lutte contre la souffrance.

L’enfant blessé que le fracas de ses petites années a contraint à la métamorphose, doit transformer ses douleurs en épreuves, résister par la rêverie, le jeu…

“Ici le jeu d’un seul trait métamorphose une situation, transforme une pesante tragédie en légère euphorie”, alors qu’aux abords de “LA MARELLE”, il y a de la mort, du mensonge, de l’inceste, du déni, de la solitude, une tendresse insupportable et tendue, des cris en contrecoup de l’injustice; la présentation d’un secret…”

DECENDRE <-> VERS LE HAUT, une distance infinie et confuse. Combien faudra-t-il de temps pour qu’un processus de réparation de l’enfant devenu adulte puisse être possible?

Aux questions que se posent les regards portés au-dessus de LA MARELLE :

  • Pourquoi devions nous tant souffrir?
  • Comment faire pour être heureux quand même?

S’ajoute également un questionnement sur le devenir des blessés; “des vainqueurs blessés qui de la boue qu’on leur a donnée en feraient de l’or” ?

Bibliographie

CYRULNIK B., “Un merveilleux malheur”

La Marelle

 

Exils

ExilsExils, immigrations, migrations…

Des langages artistiques en apparence éloignés entament un singulier dialogue : théâtre, son et images…

Dans une installation où terre, photos et graphies se côtoient et s’étreignent, les mots s’entrechoquent s’affrontent, se heurtent, fraternisent…

Bruits, musiques, voix disent aussi les mots essentiels tant oubliés : partir, quitter, marcher, s’effrayer, expulser, trembler, comprendre…

Terres natales dont les traces sont encore visibles sur les dalles rouges, mots en suspension, phrases qui reviennent d’une lointaine mémoire, les bribes de chants passés sourdent dessous la terre…

Chemins d’exils…

Déplacements en réponse au néant, au vide ou à l’oubli. Par les suspensions photographiques d’accumulations de têtes végétales (pommes de terre) dont les cicatrices sont gravées dans leur chair; cette installation évoque les départs en masse, les traces laissées derrière soi, les maux, une terre.

Exils

 

Premier Cri

premier criTout destin humain est :

«L’inconnu de la mise au monde confié à l’inconnu de la mort»

«Nous emportons avec nous lorsque nous crions pour la première fois dans le jour, la perte du monde obscur, aphone, solitaire et liquide…

(Dans l’installation PREMIER CRI) il n’y a pas d’enfants, il n’y a que des petites têtes naines, toutes ridées, chauves, édentées, ruisselantes.

De minuscules vieillards enduits de sang qui sortent du sexe d’une femme.»

QUIGNARD P., « La barque silencieuse »

premier cri